mardi, février 14, 2006

Bloody Valentine



Voilà, je me lance. Suite à une idée
d'Anisée (qui fait beaucoup pour faire avancer le blogoschmilblick, respect à toi), je vais raconter une de mes love stories pour la St Valentin.
Je venais de débarquer à Londres, j'avais tout juste 20 ans. Le logement étant déjà le problème number one à l'époque, je m'étais dégotée une chambre dans une YMCA, qui accueillait...un peu tout le monde, en fait. L'ambiance y était assez sympa et je me suis tout de suite fait adopter par une bande d'Irlandais, qui travaillaient tous mais passaient leurs soirées à boire de la bière et à fumer du shit (jusque là, pas trop de différence avec les anglais). J'ai découvert le rituel du week end, les pubs et les discos qui ferment à deux heures du matin. C'est là que j'ai compris à quel point j'étais exotique en tant que française au tempérament (et au physique)latin bien assumé. Je n'ai jamais eu autant de succès de ma vie, pour la première (et seule fois, d'ailleurs) j'avais l'embarras du choix, c'était limite harcèlement. Dans la rue, je me faisais aborder par des types que JAMAIS je n'aurais rembarrés en France qui me collaient pour ...pour coucher avec moi, en fait, les françaises sont des salopes, c'est bien connu.
J'avoue que tout ceci m'a un peu tourné la tête. Alors, comme je pouvais choisir, j'ai choisi ...le plus beau. Il s'appelait Damien,(prononcez /deimien/) il était étudiant en droit et travaillait dans un cabinet d'avocat. Comme dans les contes, il avait les yeux bleus et des cheveux d'or et la peau fine et transparente des gens qui ne voient jamais le soleil. Je le trouvais magnifique, mince dans ses jeans et ses pulls en maille irlandaise. Déjà, j'étais tombé amoureuse de son accent si particulier. Il m'apprit que le gaélique était sa langue maternelle, qu'il venait du comté de Cork et que sa famille descendait d'un roi d'Irlande ( ce qui est vrai, presque tous les Irlandais ont cet ancêtre en commun, la comparaison de leur ADN l' a prouvé récemment). Je buvais ses paroles comme une vraie tonta, que je suis encore rassurez-vous. Je passais mes nuits dans sa chambre de 10m2, sans dormir, à l'écouter parler, ou à écouter ses copains parler de l'Irlande et encore de l'Irlande.
Ils parlaient des Brits aussi.Ils les appelaient "the Bastards".Sur leurs étagères, ils avaient des rubber bullets, des balles en caoutchouc, récupérées je ne sais où. J'ai été surprise de la taille de ces trucs, aussi gros que des oeufs et je me suis dit que tirées à bout portant, elles pouvaient très bien tuer quelqu'un.
Dans ma tête, c'était LUI bien sûr, tout collait...l'Irlande, mon âge, son côté héros fatigué à la Gary Cooper. Nous ne connaissions pas depuis quinze jours qu'il m'a demandé de venir en Irlande pour la Saint Patrick. Entre temps, nous aurions fait un détour par Gretna Green ...pour nous marier en 5mn comme à Vegas!!! Pour moi, çà ne faisait aucun doute, j'ai même envoyé une lettre à ma meilleure amie pour lui annoncer la nouvelle!!
Entre temps, j'ai déménagé de la YMCA et pris un bedsit en ville. On se voyait moins, il avait pas mal de boulot. Un samedi soir, j'ai acheté une bouteille de Baileys avec mes maigres moyens et je l'ai attendu. Il avait promis de venir...
Je l'ai attendu presque 3 heures. J'ai appelé la YMCA tous les quarts d'heure, sa chambre ne répondait pas. Je suis devenue folle, j'ai enfilé le pull d'Aran qu'il m'avait donné sur mes collants et je suis partie le chercher.
Lorsque je suis entrée dans la salle commune, je l'ai vu et j'ai eu un coup dans la poitrine. Il était là avec ses copains, une fille, une française qui venait d'arriver,comme moi un mois et demi plus tôt, sur ses genoux...
C'était pire que tout. Il m'a vue et est venu vers moi, on est monté dans sa chambre sans se dire un mot. J'avais envie de lui coller une paire de gifles et avec le recul, je me dis que j'aurais du. Une fois seuls, il m'a dit que nous devions prendre du recul, qu'il s'était trop emballé, qu'il avait peur, que je n'y étais pour rien. J'étais sans voix. Une rupture n'est jamais évidente mais en anglais c'était le pompon!! Alors me sont venus aux lèvres, des mots qui n'étaient pas les miens, ceux de Supertramp, dans la chanson.

Ca n'a pas marché bien sûr... la mendicité ne paie pas en amour.
Alors j'ai vomi dans son lavabo, tordue en deux, en m'excusant comme une conne. J'aurais du dégueuler sur son lit mais à l'époque, je manquais de suite dans les idées.

Je suis retournée dans mon bedsit, vider la bouteille de Baileys en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je ne l'ai plus jamais revu.

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