Je ne connais pas la musique
mais je connais la chanson.
« Tu fais tout pour
te rendre intéressante » « Arrête de faire ton intéressante »
Bien sûr que je fais tout
pour me rendre intéressante, qu’est ce qu’il y a de plus intéressant que de se rendre
intéressante.
D’abord, je me regarde,
sans cesse, dans les miroirs, les fenêtres, les vitrines, l’eau des flaques. Je
vérifie que tout est en place, mon maquillage, mes cheveux, je prends les poses
des mannequins blondes aux yeux bleus des magazines, je cherche mon meilleur
profil. Je ne quitte jamais mon poudrier que j’ai volé au Prisunic des Cinq
Avenues, je fais des retouches maquillage six fois par jour.
Et puis je chante en play
back devant le miroir, je connais des centaines de chansons par cœur, je
retrouve les paroles en anglais à l’oreille . Devant mon miroir, je chante
avec ma brosse à cheveux, je danse en soutien gorge et short en jean, je suis
Madonna et mon public est en extase devant moi. Un parterre de milliers de
spectateurs. Un jour, je danse et je saute si fort que le miroir accroché dans
le couloir tombe et se brise en mille morceaux
« Tu es encore en
train de faire ton intéressante »
Je pleure, je pleure
quand mon père m’explique les maths, je pleure quand le prof tape sur ma table
au premier rang pour avoir le silence, je pleure quand Marc me quitte
dans le vestiaire de foot, je pleure à table le soir et les larmes tombent dans
ma purée mousline. Je pleure partout et tout le temps .
« C’est pas fini la
comédie ? »
C’est une chanson de
Dalida … « C’est fini la comédie ». Je rêve de pièces à succès dans
le décor tout bleu d’un théâtre de banlieue. Je rêve d’être remarquée par un
réalisateur à la fin d’une projection. Je rêve, je rêve, je rêve
« Et allez c’est
parti pour l’acte 3 scène 4, tu devrais monter sur scène ou écrire des
pièces »
Carnets Pierrot Love,
machine à écrire, je fais défiler des mots, je fais défiler des phrases, je
m’invente une vie que je n’ai pas. Mes
rêves deviennent réalité sur un plateau… Avril 2018, je te retrouve Isabelle 13 ans, tu es enfin là, je te serre la main très fort pour ne plus la lâcher.