mercredi, août 02, 2023

Nager dans le bonheur. Dédicacé à tous les mâles alphas fan de VTT, de kite, de surf sous couette, de c*p*tes trop étroites et d'additions (presque) séparées !.






Nager dans le bonheur 


3 tableaux 

2 personnages principaux hétérosexuels cisgenres. 1 est un homme 2 est une femme,  rencontre via une appli a flamme orange. Tableau 3 : voix off de 3, homme hétérosexuel cisgenre au téléphone.


Tableau 1 


Au téléphone 


1  Salut !

2   Salut !

1 Tu fais quoi comme sport?

2 Comme quoi ?

1  Comme sport.

2 Heu, ben je …

1 Moi je fais du surf, du VTT, du kitesurf et de la planche à voile.

2 Ha c’est super mais en fait moi je…

1 Mais mon sport favori c’est le VTT.

2  C’est top mais alors moi j' en ai fait une fois et enfin bon c’est pas…

1 Faut que je fasse du vélo, du surf ou de la planche à voile. Mais j' ai pas le temps là je me barre avec les copains faire du snowboard, tu fais quoi samedi midi ? Je t’invite au resto après je me barre c’est le dernier week-end de neige de la saison donc je peux pas louper ça tu comprends? 

2 Oui bien sûr, alors samedi oui normalement je suis…

1 On va a la Gauloiserie c’est un resto qu' on m’ a conseillé, parait que c’est le top, allez à samedi, mets une robe et du rouge à lèvres,  hahaha !

2 Oui, en fait moi je suis plutôt pantalon parce que … 


1 à raccroché



Tableau 2 


Resto 


1 Bon ben ça fait plaisir de te voir en vrai, ça te va cette table ou plutôt celle-là ou alors viens, on prend celle-là .

2 Heu oui, au soleil c’est bien là.

1 Tu trouves pas que ça sent un peu la friture? Je m’y connais tu sais, j' ai fait les cinq continents moi, j’ai travaillé worldwide !  T' es déjà allée en Thaïlande? Putain tu bouffes pour 3 fois rien là bas ! Parce qu' ici, ça coûte une blinde, non mais ne te casse pas, je t'invite, prends ce que tu veux, mais c' est pas pour dire des panisses  à 8 euros ils se foutent de la gueule du monde. Tu voyages beaucoup toi?

2 Ben non pas tellement parce qu' en fait…

1 Je veux me barrer en Tunisie faire du kite surf, ça te dit la Tunisie tu connais ?

2 Ha ben non et justement je me disais …

1 Ha ben on y va ! Ça te dit? Moi tu sais c’est pour ça que les femmes m adorent, on m a jamais quitté d ailleurs, au bureau quand elle ont su que j étais célibataire elles étaient comme des folles.  Je suis un poète en plus.  T'es littéraire  toi? Moi j adore, je compose mes poèmes, mon kif c’est l alexandrin 

 Écoute  : «  N’ agissant qu'avec son cœur de pierres sèches elle / le transperça de sa beauté sensuelle » . T’aime ?  C’est de moi !

2 Je crois que le 2e vers n' a que onze pieds. ( elle compte)

1 Mais non on dit sen\su/e/lleuh c était comme ça qu' on le prononçait au temps de Corneille, tu connais Corneille, l’auteur de Phèdre  ?

2 En fait,  je crois que  Phèdre c’est Racine ..

Un temps

1 Bon la Tunisie, c’est bon? On part? T' es chaude? Parce que moi c’est comme ça, hop on y va, you know what I meanThe bill please, l' addition s' il vous plaît! Tu voulais pas de dessert au fait? Putain 8 euros un moelleux,  c’est du vol, sans déconner ils se croient à Manhattan ou quoi?  Ha merde, putain y a un os! 

2 Quoi ?

1 Ben c’est mort la Tunisie   :  tu fais pas de kitesurf.



Tableau 3 


Au lit.

1 check un parcours de VTT sur son Iphone 14, un bras passé autour du cou de 2

1 Alors ? Heureuse ? Je te l' avais pas dit ? “Nager dans le bonheur, surfer la ligne de cœur, la foufoune en fleur” . C’est ma devise ! Hein, tu sens comme on s' entend bien? Bon, j’ai galéré pour la capote, déso, j’ai pas tenu trop longtemps,  hein, c’est parce que j’ai la  base de la bite très large et en plus tu vois cette veine ? Ben, les capotes trop étroites, ça la comprime, le corps caverneux est mal irrigué et total je bande pas terrible, mais sans capote, je suis un Dieu, on essaiera la prochaine fois. 

2 Ben non, enfin moi je préfère avec parce qu’on est pas …

1 Et puis moi, je prends le plaisir de ma partenaire au sérieux!  T’as aimé le cunni que je t’ai fait, sans me vanter, je suis le roi du cunni, y en a même qui se sont évanouies !

2 Oui, oui, enfin moi il faut que ça dure un peu plus longtemps pour que je ...enfin…et puis t'étais pas vraiment sur mon...

1 Attends, attends, faut que je me concentre ! Alors, fais voir la météo ! Putain merde ils font chier!

2 Quoi?

1 Ben y a un épisode cévenol qui va s' abattre sur la région, la pluie, l’orage, quoi. Regarde la dépression la ( il montre sur son portable), c’est plein de cumulo nimbus.  Tu sais que moi j' ai posé des balises pour Météo France à 50 m de profondeur que je faisais de la plongée. Tu as vu mon carnet de plongée ? Je te le montre?  Il est épais comme ça !

1 Franchement, t’es pas obligé.

2  J' étais sur un bateau de Greenpeace on collait au cul des types qui faisaient du braconnage de rorqual bleu.  Tu sais celui qui est en voie de disparition ?

1  Non, mais quel rapport avec ta météo là? Il y a 60 millions d' espèces en voie d'extinction de toute façon ! 

2 Ben tu comprends pas? La pluie va tout raviner dans la combe de la Mole et la résurgence va tout inonder, et je pourrai pas faire de VTT .  Putain ! Quelle heure il est ? Il faut que je me grouille. Bon, ça va?  Heureuse ? Bon, je me tire, le week-end prochain je vais faire du surf mais on s' appelle et puis si j' ai une fenêtre de tir on se voit mais enfin tu vois , j' ai pas trop le time, carpe diem hein tu es d’accord ? ( il la regarde) T’as pas un bouton de fièvre la? Bon je préfère pas t' embrasser, je veux pas me ruiner le week-end, ça serait con. Bye.


1 sort. 2 reste seule .


Le téléphone sonne, au bout du fil 3 en voix off.


3  voix off : Salut 

2 salut

3 Tu fais quoi comme sport?


2 raccroche





vendredi, mai 19, 2023

FEMINA TRITA

 



Elle aussi, elle écrit. Elle écrit de chez les vieilles pour les vieilles et les moins vieilles, pour les MILFS, les Jennifer Coolidge qui n’ont pas de Golden Globes, enfin si mais pas les mêmes, celles qui ont des bouffées de chaleur et envie de baiser quand même, celles qui n’ont plus leurs règles ou plus d'utérus ou plus d’ovaires, de toutes façons à leur âge c’est pas grave mais qui se font quand même taguer sur les sites pornos #blonde #lunettes #grosseins #coquine.

Elle écrit de chez les femmes dont Yann Moix ne veut pas, ni Jean Luc Lahaye. DiCaprio et Brad Pitt c’est plus chiant, mais bon on survit. Elle écrit de chez les pas fraîches, de celles qui sont dans ton lit mais qui n’ont plus vingt ans depuis longtemps. 

Elle écrit de chez celles qui paniquent devant l’horloge biologique, de chez celles que la trouille réveille, le soir entre leurs draps roses trempés de sueur. 

Elle écrit parce qu’elle ne veut pas mourir, pas encore, pas tout de suite.


Elle écrit pour dire que elle aussi, elle a le droit de dire non quelquefois. Parce qu’elle les a dans son lit, ou elle les a eu, ou elle les aura, les petits copains des autres, ceux qui ne la draguent que sur Tinder et surtout pas dans la vraie vie. Oh, elle peut rester longtemps dans un bar, la nuit, au comptoir, décolleté, jupe de cuir et talons, elle sera bien tranquille, personne ne viendra, elle peut écrire “Guerre et Paix” sur son téléphone, personne n’en aura rien à foutre, elle se fera peut-être draguer par le serveur dans l’espoir d’un pourboire mais c’est tout. C’est quand elle rentre chez elle que sa vie commence, que son portable commence à vibrer au son cristallin de toutes ses notifications colorées. C’est la nuit que remuent des flots de messages sur fond bleu marine ou vert émeraude éclairés par la lueur laiteuse d’un écran qui rougit les yeux. 


C’est là qu’elle prend vie, c’est là que son pouvoir refait surface, pas qu’elle l’ait souvent eu le pouvoir, mais là, elle a l’impression de prendre les choses en main, quand le type a la vingtaine, un physique d’acteur prometteur, les yeux verts comme le feuillage d’un platane un soir d’été et la peau polie comme du bronze . Elle n’a jamais été foutu de faire attendre qui que ce soit, trop peur de lâcher la proie pour l’ombre, car oui, c’est une proie, ce petit minet friand de bonnes MILFS comme il disent et elle se voit en chasseresse, en Grande Mère, en Kali mangeuse d’Indiana Jones, ce genre de conneries qu’on se raconte alors qu’on va tout bonnement passer à la casserole et s’allonger bien docilement, comme on le fait depuis plus de trente ans, sans se demander si on en a VRAIMENT envie. Elle a découvert la zone grise en 2017 comme tout le monde, elle  a repensé à son dépucelage à l’âge de seize ans et demi, un vrai carnage, une douleur pas possible, sans capote bien sûr et elle a vite mis le mot de zone grise dessus pour pas en mettre un autre parce qu’elle a pas dit non et qu’après non plus, elle a pas dit non. Jamais personne ne disait non au  temps béni des colonies, du moment que le type était là, la main dans ta culotte, tu disais pas non, c’était toi qui l’avait laissé aller trop loin, c’était ta faute, donc ferme les yeux et pense à autre chose, comme ta mère et ta grand-mère et toutes les femmes auparavant jusqu’à la première qui s’est fait prendre en levrette par surprise au bord d’une rivière, ca lui apprendra a se balader le cul à l’air.


Quand elle ouvre au beau jeune homme au physique d’acteur prometteur à 1h du matin, elle n’est pas agneau terrifié mais femme puissante, géante aux pieds d’hématite, qui broie les hommes entre ses cuisses de déesse et les dévore tout crus. Elle est en plein empowerment, elle prend le contrôle enfin, elle a crevé le plafond de verre dans le secret de son alcôve, le pouvoir est là, à portée de main, sous la forme de la bite d’un mec qui a la vingtaine.


Le problème c’est le gag reflex, cette incontrôlable envie de gerber. Elle vient surtout quand on prend ta tête en te tirant bien les cheveux et qu’on enfonce un objet contondant, en l'occurrence une queue bien raide jusqu’aux cordes vocales en te disant “Suce !”. Et tout en essayant de te dégager mais bien sûr c’est pas facile, on peut dire ce qu’on veut sur l'empowerment y a un moment où malheureusement c’est pas suffisant, tu te traites de tous les noms. Tu ne lui en veux pas a lui non, pas à celui qui est en train de te violer, parce que même si tu n’as pas eu le temps de dire non et que par la force des choses là, tu ne peux plus, tu es loin d’être consentante, non, tu t’en veux à toi, parce que tu lui as dit de venir, tu lui as ouvert la porte et tu as joué le jeu, dentelle, jupe de cuir, talons haut et que t’as cinquante ans mais que t’as pas retenu la leçon, t’as pas écouté ta maman, t’as fait entrer le loup dans la bergerie et que c’est bien fait pour ta gueule. Tu l’as fait venir parce qu’il est beau, jeune et prometteur et qu’il te donne l’importance que la société te refuse et t’a toujours refusé. Et puis de toutes façons, qui te croira ? Estime-toi heureuse qu’il s’intéresse à toi, tant pis pour les cordes vocales, un peu de miel et ca ira. On te jugera, on te haïra, pire que Madonna dans ses vidéos Tik Tok, ferme ta gueule vieille peau, sorcière, on va te foutre au feu comme un vieux fagot avec ta peau sèche comme un croco, tu vas flamber tout de suite. 


Alors c’est ce qu’elle a fait. Elle a bien fermé sa gueule et laissé d’autres l’ouvrir à sa place. Mais aujourd’hui c’est fini, aujourd’hui elle écrit, elle aussi.


mercredi, novembre 23, 2022

PORNEIA.

 PORNEIA



Elle


Je t’aime, je te mange, je te gobe, j’avale ta blessure.


Je t’aime, je te veux, je te jette, je remplis ta fêlure.


Je t’aime, je t’ai horreur, je t’ai pitié, je recouds ta déchirure.



Lui


La chair est triste, elle est sinistre et déchirure


Nous saborde, nous emporte dans les lèvres de sa blessure.


Nous spirale, nous  vertige, liquide noir des fêlures.



Eux


Nous naissons hérétiques, déviants, hybrides arborant nos fêlures


Nos yeux vairons, nos corps humides, taches de naissance, déchirures.


Nos nuits sans fin, nos verres sans fond, nos cendriers pleins de nos blessures.


samedi, février 19, 2022

Atelier Salammbô épisode 3

Les premières lueurs du soleil implacable n’allait pas tarder à nimber d’or pur les arêtes des minarets de la ville. Bientôt, retentiraient les appels du muezzin pour la sunnat al shob la première prière du matin. Allongée sur la paille fraîche, Valina avait retiré ses oripeaux. Je détaillais la perfection de son corps, ses pieds exquis comme des bibelots de porcelaine, ses mollets ronds, ses longues, cuisses fuselées, son sexe épilé au caramel, lisse comme un coquillage poli par le ressac, son ventre moelleux comme un coussin de satin, ses seins, enfin, lourds et fermes, ornés d’un délicieux bouton de rose. Sa bouche était renflée comme celle d’une enfant, sa chevelure dénouée rappelait celle des femmes au bain que l’on voit dans les tableaux vénitiens. Je me rapprochais d’elle, ôtais mes vêtements crasseux. Une cruche était à portée de ma main. J'humectais mes lèvres puis entrepris de faire boire ma compagne. Elle ouvrit ses yeux clairs, sortit sa langue rose corail, franchissant la délicieuse barrière de ses petites dents perlées. Je pris alors une gorgée d’eau dans ma bouche. La tête penchée sur elle, je posais mes lèvres sur les siennes satinées à souhait et entreprit de remplir sa gorge du liquide réchauffé par mon palais.

mercredi, février 16, 2022

Atelier Salammbô épisode 2

À la nuit tombée, je finissais de huiler la serrure de la porte donnant sur les remparts sud de la ville. Une fois la fiole dissimulée sous mes vêtements, j’introduisis la clé dans l’orifice avec précaution et la fis tourner sans un bruit. Silencieuses et souples comme des panthères, mes deux compagnes, Aichata et Valina me rejoignirent. Les seins bandés, délivrées de leurs voiles multicolores, la chevelure dissimulée sous un épais bonnet de laine, elles ne laissait rien paraître de leur féminité. Sur un de mes signes, la première s’engouffra dans l’ouverture d’où parvenait une odeur pestilentielle de boyaux en décomposition. Comme je m’apprêtais à franchir le seuil, je sentis une main implacable sur mon épaule, tandis qu’un ordre sec claquait à mes oreilles. “Arrête, femme.” La poigne qui me maintenait appartenait au Grand Eunuque, responsable sur sa tête du harem du sultan. Cette serre sur mon cou, me dégoûta au plus profond de moi-même, plus jamais je ne me laisserai emprisonner entre quatre murs. Je me retournai pour faire face . Je vis son visage se figer et se déformer en une grimace atroce. Sa bouche s’ouvrit et laissa jaillir un hoquet puis un flot de sang noir qui éclaboussa mes braies de grosses toiles. Lorsqu’il s’écroula dans le parterre de roses trémières, je sentis une main fraîche sur mon épaule à l’endroit où la serre du Grand Eunuque s’était naguère posée. “Viens” souffla Valina à mon oreille. Sans chercher à comprendre, je la suivis. Plus rien ne comptait que son souffle de vie à mon oreille comme un appel d’air pur. Nous plongeâmes, sans une hésitation, dans le tas d’immondices qui se trouvait derrière la porte. Des carcasses de moutons s’y décomposaient, exsudant une boue rougeâtre qui se mêlait à la paille souillée en un fumier malodorant. Déjà, des profondeurs du palais, retentissait l’appel à l’hallali. L’impensable s'était produit : des femmes avaient quitté le harem! Étroitement enlacées dans la fange sanglante, Valina et moi luttions pour ne pas nous y engloutir. Je ne savais pas ce qu'il était advenu d’Aichata, notre compagne. Soudain, un cri atroce de femme frappée à mort, monta de l’épaisseur de la nuit. Pas une seule seconde, je ne pus m’attarder à imaginer la chute du corps sur les marches de marbre, le gargouillis du sang remplissant peu à peu les poumons, et les mains battant faiblement l’air comme des poissons à l’agonie. Seul comptait le souffle précipité de Valina à mon oreille. Avant l’aube, les cris de la ville avaient cessé de résonner à nos oreilles. Cachées dans une réserve à sel du Mellah, le quartier juif de Meknès, nous attendions que nos complices viennent nous faire signe. Nous partirions et gagnerons le désert une fois la nuit tombée.

dimanche, décembre 26, 2021

Atelier Salammbô : épisode 1


                          






              C’était dans les jardins de Meknès, par une chaude après-midi d’été.


Les carpes dorées nageaient dans les bassins de porphyre. Leur bouches venaient caresser la surface de l’onde dans l’espoir d’être nourries par des mains aimantes. 

Je laissais mes doigts aller au fil de l'eau parfumée. Le murmure des oiseaux me parvenaient  depuis les hauts palmiers qui protégeaient ma retraite du soleil. 

Assise au bord d’une vasque, le regard perdu dans le miroir liquide qui se tendait vers moi, mes pensées
oisives me ramenaient sans cesse à la magnificence de ces jardins, orgueil du sultan. Dix ans s’étaient écoulés depuis que j'avais été capturée sur les rives de ma Géorgie natale. Je n’avais rien connu d’autre que cet enclos paradisiaque, flanqué de hauts murs que l’on disait infranchissables.

La chaleur nous écrasait moi et mes compagnes. Nous avions pour certaines pris refuge à l’ombre de ces immenses palmiers dattiers. Les autres restaient cloîtrées dans l’austère palais impérial, à l'abri des regards derrière ses fenêtres grillagées. Je fermais les yeux et m’imaginais à leur côté, dans les profondeurs du harem. Le hammam exhalait son souffle humide de bête somnolente. Les effluves de romarin, d’orange et d’eucalyptus enveloppait les formes onctueuses des courtisanes alanguies, leurs fronts perlés de sueur, leur chevelure opulentes dont chaque mèche avait été spécialement éclaircie, nourrie et parfumée pour la caresse d’un seul homme.


Après tout, pourquoi se préoccuper du lendemain.  Il n’y avait qu’à frapper dans ses mains pour voir apparaître sur un plateau d’argent une minuscule théière fumante accompagnée de pâtisseries fraîches.


Oui à quoi bon… Qu’importe le lendemain, qui ressemblerait à tous les autres jours, s’étirant paresseusement telle une liane au soleil. 

Pourtant, je n’avais que faire d’un autre jour passé à nourrir mon ennui de cornes de gazelle et de pastilla au lait, seule comptait la nuit. 

J’attendais impatiemment le lever de Tanit dans ses voiles ombreux. Une seule nuit, dans une seule vie, me disais-je, en refermant mes doigts sur la petite clé d’argent, que venait de me remettre l'eunuque que j’avais soudoyé.


A suivre


dimanche, mai 09, 2021

Tout pour se rendre intéressante...

 



Je ne connais pas la musique mais je connais la chanson.

 

« Tu fais tout pour te rendre intéressante » « Arrête de faire ton intéressante »

 

Bien sûr que je fais tout pour me rendre intéressante, qu’est ce qu’il y a de plus intéressant que de se rendre intéressante.

 

D’abord, je me regarde, sans cesse, dans les miroirs, les fenêtres, les vitrines, l’eau des flaques. Je vérifie que tout est en place, mon maquillage, mes cheveux, je prends les poses des mannequins blondes aux yeux bleus des magazines, je cherche mon meilleur profil. Je ne quitte jamais mon poudrier que j’ai volé au Prisunic des Cinq Avenues, je fais des retouches maquillage six fois par jour.

 

Et puis je chante en play back devant le miroir, je connais des centaines de chansons par cœur, je retrouve les paroles en anglais à l’oreille . Devant mon miroir, je chante avec ma brosse à cheveux, je danse en soutien gorge et short en jean, je suis Madonna et mon public est en extase devant moi. Un parterre de milliers de spectateurs. Un jour, je danse et je saute si fort que le miroir accroché dans le couloir tombe et se brise en mille morceaux

 

« Tu es encore en train de faire ton intéressante »


 

Je pleure, je pleure quand mon père m’explique les maths, je pleure quand le prof tape sur ma table au premier rang pour avoir le silence, je pleure quand  Marc me quitte dans le vestiaire de foot, je pleure à table le soir et les larmes tombent dans ma purée mousline. Je pleure partout et tout le temps .

 

« C’est pas fini la comédie ? »

 

C’est une chanson de Dalida … « C’est fini la comédie ». Je rêve de pièces à succès dans le décor tout bleu d’un théâtre de banlieue. Je rêve d’être remarquée par un réalisateur à la fin d’une projection. Je rêve, je rêve, je rêve

 

« Et allez c’est parti pour l’acte 3 scène 4, tu devrais monter sur scène ou écrire des pièces »

 

Carnets Pierrot Love, machine à écrire, je fais défiler des mots, je fais défiler des phrases, je m’invente une vie que je n’ai pas.  Mes rêves deviennent réalité sur un plateau… Avril 2018, je te retrouve Isabelle 13 ans, tu es enfin là, je te serre la main très fort pour ne plus la lâcher.